Nous, Homos Sapiens, sommes probablement les seuls êtres conscients de soi sur Terre. Du moins, assez conscients de soi pour faire un choix difficile dans le présent, mais qui va être plus bénéfique dans le futur. Assez conscients pour infliger de la souffrance par pure méchanceté, et non par nécessité. Un lion ne tue pas une gazelle lentement pour la faire souffrir. Il la tue rapidement parce qu’il se doit de manger.
Cependant, être conscients est une immense bénédiction. Nous avons le pouvoir de changer le futur pour le mieux. Nous avons le pouvoir d’avoir de la gratitude pour les bonnes choses dans notre vie. Plus facile à dire qu’à faire ; nous avons évolué pour considérer significativement plus le négatif que le positif dans notre vie. La plupart feront l’expérience de beaucoup plus d’émotions négatives en perdant 5$ que d’émotions positives qu’en trouvant 5$ dans la rue. Cette propension vers le négatif a fait beaucoup pour notre survie à travers les millénaires, quand les temps étaient beaucoup plus difficiles qu’aujourd’hui.
Sans vraiment le savoir, la qualité de vie de pratiquement toute l’humanité s’améliore en ce moment, et ce à un rythme effréné. Du moins, au niveau économique et au niveau de la malnutrition. Pourtant, nous avons tendance à voir disproportionnellement le négatif (nous l’avons particulièrement vu pendant la pandémie) dans tout ça. C’est la nature humaine.
Le concept de gratitude est à la mode en ce moment, mais combien d’entre nous la pratiquons régulièrement? J’y mets mon grain de sel dans l’article qui suit.
Le Conseil de Famille!
La période des repas (et spécialement le souper) est un événement unique à travers le monde, et ce dans toutes les cultures. C’est donc naturel pour les gens de profiter des repas pour parler de leur journée, de lancer des idées et de faire des réflexions sur la vie. C’est pourquoi, à chaque fin de semaine, hebdomadairement, à tour de rôle, ma femme et moi avons décidé de profiter du souper pour pratiquer la gratitude et faire des réflexions conscientes sur la semaine qui vient de passer. Depuis la fin de la pandémie, nous avons aussi pu profiter de la présence de membres de la famille et d’amis qui ont rendu l’expérience d’autant plus agréable, en nous partageant des morceaux de vie qu’ils n’ont pas l’habitude de partager. Voici en quoi ça consiste!
1) Question #1 : Pour quoi éprouvez-vous de la gratitude cette semaine? À mon avis, c’est la question la plus difficile et la plus ésotérique. Facile d’y aller avec une phrase générale comme :
” je suis reconnaissant d’avoir une famille en santé”. ”Get a life”. Sans blague, je dis aux gens qu’ils ont le droit de la dire une seule fois, celle-là. Il est important pour nous d’être précis dans notre description, puisqu’il nécessite d’être beaucoup plus sérieux(se) dans notre réflexion quand un réel travail d’introspection est fait. Que quels membres de ta famille soient en santé? Pourquoi? Etc.
Personnellement, cet exercice a fait plus pour moi dans la dernière année que probablement n’importe quoi d’autre. Mon habileté verbale n’a jamais été trop élevée, et les occasions de partager (faire une réflexion, puis la mettre dans des mots avec des gens qui comptent) ce genre de choses sont rares dans notre culture, j’imagine. Nous nous éloignons collectivement tranquillement de ce genre de communion.
Il n’est certainement pas impératif que ce soit quelque chose de profond, même de spirituel. Par exemple, en fin de semaine, ma gratitude personnelle a été aussi simple que suit :
”je suis reconnaissant des fraises, framboises et bleuets de juillet. C’est toujours une période spéciale parce qu’ils sont tellement meilleurs que le reste de l’année, et qu’en plus, on peut en trouver partout. En plus, il y a des gens qui les ramassent pour nous”!
Après un tour de table au cours duquel chacun y va de sa réflexion, on passe à la deuxième question.
2) Qu’est-ce que quelqu’un a fait pour nous cette semaine? Cette question est un antidote contre le cynisme. Il y a toujours des choses que quelqu’un a fait pour nous, sans rien attendre en retour. Aussi futile que ce geste a pu être. Si aucune réponse valable n’est trouvée, peut-être passons-nous trop de temps tout seuls? Chances raisonnables que ce soit le cas. Cette semaine, ma réponse a été :
”cette semaine, mon voisin est embarqué dans le CRV avec moi pour aller chercher la Fiesta au garage, puis a ramené le CRV chez moi”.
Il avait sûrement quelque chose d’autre à faire, mais il a pris 30 minutes pour faire ça. Je le remercie. Ensuite, après avoir fait un tour de table, on passe à la troisième question.
3) Qu’est-ce que j’ai fait pour quelqu’un cette semaine, sans rien attendre en retour?
Cette question est la plus confrontante, aucun doute là-dessus. À maintes reprises, les gens avec qui nous soupions ce soir-là n’avaient pas de réponse à cette question. À mon avis, c’est pour l’une de ces 3 raisons ;
1) ils ne se rendaient pas compte qu’ils faisaient souvent des choses pour les autres, même dans un contexte de travail. Ce n’est pas parce qu’on est payés présentement pour travailler qu’on n’est pas en train de faire quelque chose d’extra (quelque chose qui n’est pas dans notre définition officielle de tâches) pour aider un client ou un collègue.
2) la réflexion n’est pas assez profonde.
3) véritablement, ils avaient passé une semaine entière sans véritablement aider quelqu’un sans aucune attente. Ce que j’aime de cette réalisation, c’est qu’elle est confrontante, mais par elle-même. Les gens autour de la table n’ont rien à dire pour le faire réaliser à la personne qui parle. On a souvent vu des gens dire :
”ouin, ça fait dur. Va falloir que je travaille là-dessus”. Magnifique. Cette semaine, mon exemple a été : ” cette semaine j’ai pris rendez-vous pour ma voisine avec Francine. Elle a des douleurs à plusieurs endroits, et je pense que Francine va l’aider”. On fait un tour de table, et on passe à la quatrième et dernière question.
4) Qu’est-ce que j’ai appris cette semaine?
Ce que j’aime particulièrement de cette question, c’est qu’elle permet de synthétiser son apprentissage et de le mettre dans des mots. J’ai personnellement la chance de le faire presqu’à chaque semaine par le biais de mon infolettre, mais beaucoup de gens n’ont pas cette chance. À mon avis, pour concrétiser un apprentissage, il faut être capable de le vulgariser, de le comprendre, de l’expliquer aux autres. Aussi, ça nous permet à tous d’apprendre quelque chose qui n’est certainement pas dans notre champ d’expertise. Cette semaine, j’ai mentionné :
”cette semaine, j’ai appris beaucoup sur la situation politique actuelle en Haïti. Ce mois-ci, c’était la première fois qu’un président était assassiné dans les Amériques (Amérique du Nord, Centrale et du Sud) depuis JFK. La démocratie est vraiment en danger là-bas en ce moment”.
Pratiquer la gratitude n’a pas à être intimidant, et n’a certainement pas besoin de ressembler à un rite voodoo ou de la méditation. Ça peut prendre 10 minutes, une fois par semaine autour d’un repas. Et changer des vies pour le mieux.
Soyez bons!